Enfant de boche, un témoignage émouvant de Jehan Sauval
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Pendant la dernière guerre, mon futur père Allemand, est venu travailler à Amiens. Ma future mère française, vivait alors chez ses parents, car son mari était prisonnier en Allemagne. Pour gagner de l’argent, elle faisait le ménage chez cet Allemand. Ils se sont aimés et je suis né en janvier 1943. Ma mère et mon père voulaient m'appeler Johan mais comme c'était un prénom allemand, il a été refusé. On lui a proposé de le remplacer par Jehan. Mes deux autres prénoms sont ceux de mon père, Gérard et Edmond.
Mon père venait souvent nous voir. Il me promenait en landau et m'a appris à marcher. Il était très aimé de nos voisins. Peu avant la libération, il est reparti et a laissé à la maison sa " caisse à outils " (c'est pour moi mon trésor de guerre), en disant qu'il reviendrait. J’avais 19 mois environ. Il était Maître mécanicien dans le civil. Mon oncle voulait cette caisse. Mais nous l’avons gardée. Ma mère m’a toujours consulté lorsqu'il s'agissait de mon père ou, plus tard, encouragé à le rechercher en me donnant tous les renseignements utiles afin d'essayer de le retrouver. J'ai été élevé dans le culte de ce dernier.
À cette époque mon père avait un chien, UWE qui était très attaché à notre famille. Il dormait et montait la garde au pied de mon berceau. Il est resté avec nous après le départ de mon père. Mais nous n’avons pu le garder, les temps étaient durs avec le rationnement. Une commerçante l’a pris mais il ne s’est pas habitué. Il est mort de chagrin. Nous avons eu beaucoup de peine. C'était un Berger allemand tout noir. C'est sans doute pour cela que cette race est ma préférée.
Maman connaissait le nom de mon père, ses prénoms, l'année et sa date de naissance (à 8 jours près). Il s’était marié en Allemagne avant la guerre, sa femme se prénommait Marianne, avait 2 enfants jumeaux, (Günther et Érika) qui avaient 7 ans de plus que moi.
Contrairement à d’autres enfants comme moi, j'ai toujours su que mon père était allemand. Merci à ma mère. Grâce à elle, malgré mes origines, j'ai eu une jeunesse très heureuse. J'ai eu aussi des grands-parents formidables. Ils ont toujours, envers et contre tous, soutenu leur fille, aimé et protégé leur petit-fils. On ne m'a jamais mis à l'écart. Certains membres de la famille en voulaient à ma mère. On lui reprochait d'avoir osé me garder, alors qu'elle avait avec son mari une très bonne situation. Mais cela s'est arrangé. Je salue le courage de ma mère pendant cette époque tourmentée.
Retrouver la suite de cet article dans notre recueil "L'enfance en guerre" édité par le musée du Vermandois.
117 pages. 10 euros. illustrations couleurs.
Disponible au musée ou sur demande au 06-10-26-56-68